Journal théâtral de Tobias M. Visse

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LES PARAVENTS, Jean Genet, mis en scène par Arthur Nauzyciel

Le quatre octobre 2023, le spectacle Les Paravents de Jean Genet joua au TNB de Rennes, où il fut achevé d'être monté par Arthur Nauzyciel, quelques semaines plus tôt.

 

Le spectacle a pour but de mettre en scène l'œuvre poétique de Jean Genet, en appuyant sur son rapport avec le lien entre la vie et la mort, ou plutôt le lien entre les vivants et les morts.

Lorsque le spectateur va pour voir cette mise en scène des Paravents, il va assister à trois heures quarante-cinq de spectacle, pendant lequel il passe du rire aux larmes.

 

La scénographie est originale, voire surprenante. En effet, Nauzyciel nous propose une mise en scène des Paravents… Sans paravents. Au lieu de ces derniers, un immense escalier aux marches hautes surplombe le public, dans une sorte d’écho des gradins sur lesquels ils se trouvent. Cet escalier donne une dimension très verticale à la scénographie et offre aussi un espace de jeu et de dépense (une machine à jouer) originale et unique.

 

Les Paravents ©Philippe Chancel TNB 2023

 

Les Paravents ©Philippe Chancel TNB 2023

 

Par conséquent, la performance des acteurs est très physique — descendre et monter les marches, ramper, tomber, rouler, descendre encore puis remonter.

Le jeu des acteurs est assez hétérogène. Certains sont excellents, comme Xavier Gallais, Jan Hammenecker ou Hinda Abdelaoui, d’autres lancinants. Dans l’ensemble, leur prestance sur scène est indéniable, et arrivent à se faire oublier derrière chaque personnage, au point qu’il est difficile de comprendre tout de suite que Xavier Gallais incarne lui-même Madani ainsi que le Lieutenant.

 

De plus, l’éclairage, d’une lumière blanche bleutée, rend la scène froide et l’escalier contraste avec le fond noir. De la même manière, les tissus représentant le passage de la vie à la mort — et qui se rapprochent le plus de véritables paravents — créent un jeu d’ombre avec les silhouettes des morts.

Le spectacle utilise aussi d’autres médias, comme l’utilisation d'une voix préenregistrée (la voix du condamné à mort, jouée par l’acteur Xavier Gallais qui joue aussi Madani, le Lieutenant et l’Académicien). Cette dernière crée une sorte d'éloignement du personnage de cette voix. Il y a aussi la présence de vidéos et de photographies projetées pendant le spectacle. En premier lieu, ce sont des images sur la thématique de la guerre, plus précisément de la guerre d’Algérie, qui sont projetées sur les marches de l’escalier. Mais il y a aussi une vidéo faisant directement référence à cette guerre, projetée au début de la seconde partie, après l’entracte. Il s’agit d’un homme lisant des lettres d’un soldat de la guerre d’Algérie, Charles Nauciel, cousin du metteur en scène.

 

Les costumes sont assez réalistes pour l’époque qu’on devine être les années soixante, notamment pour les légionnaires, et plus fantaisistes, comme les costumes des prostituées. On constate le peu d’objets présents sur scène. Ces derniers souvent utilisés pour montrer qui est soldat (fusils) et le grade de ces derniers (bleu pour le sergent, rose pour les légionnaires).

 

On peut évidemment noter de multiples différences entre la pièce et le spectacle. Le texte est raccourci, la scénographie et les costumes s’éloignent des commentaires et des notes originelles de Jean Genet.

Pour conclure, Nauzyciel offre au public un spectacle à l’esthétique surréaliste et abstrait, en se tournant davantage vers la thématique de la guerre et en appuyant sur celle d’Algérie. Il s’éloigne des idées de Genet et présente donc une mise en scène personnelle et originale, qui n’en reste pas moi tout aussi poétique que la pièce elle-même.



07/10/2023
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